Nos parents sont-ils nos dieux sur cette terre?

Il y a une affirmation que je déteste et trouve carrément blasphématoire, mais qui est chère à certains Africains, il s’agit de: « Les parents sont nos dieux sur cette terre. » J’imagine que c’est une façon concise de dire qu’un enfant doit considérer ses parents comme les représentants de Dieu et leur accorder la même déférence qu’à l’Éternel. N’empêche que je trouve la formule lapidaire et nocive, notamment pour ceux dont les parents sont affectés d’un trouble de la personnalité. En effet, dire à une personne narcissique, références culturelles et/ou religieuses à l’appui: « Face à cet être vulnérable qu’est ton enfant, tu es un dieu », c’est comme donner la permission à un pyromane d’incendier tout ce qu’il veut, en lui fournissant les allumettes et le bidon d’essence!

Élevée par une mère musulmane, j’ai grandi en entendant, entre autres: « Le prophète a dit que la mère était plus importante que le père; que le paradis était sous les pieds de la mère; que la mère était la personne la plus importante dans la vie d’un individu; que les prières d’une mère étaient toujours entendues. » J’avoue que mes oreilles de chrétienne ont toujours plus ou moins filtré, toute phrase qui débute avec « le prophète a dit », surtout si elle est utilisée pour excuser ou minimiser des abus. Toutefois, je connaissais les 10 commandements, notamment:

« Honore ton père et ta mère, afin que tes jours se prolongent dans le pays que l’Éternel, ton Dieu, te donne.«  (Exode 20:12)

Par conséquent, je veillais à obtempérer systématiquement et ceci a continué après que j’aie intégré le marché du travail. Pour moi, « honorer » signifiait « obéir » et avouons que dans le cas d’un enfant mineur, les deux verbes sont synonymes. Honorer, c’est accorder à une personne le respect qui lui est dû en raison d’un titre ou de sa position. Bien souvent, ce respect est exprimé par de l’obéissance à l’égard de cette personne, surtout si elle détient une autorité quelconque sur nous. Une fois que l’on atteint la majorité ou que l’on ne vit plus sous le toit de nos parents, on est délié de cette obligation d’obéissance absolue mais toujours tenu à celle d’honneur envers eux. En un mot, l’enfant adulte n’a pas à laisser son parent lui imposer sa conjointe ou décider de là où il devra vivre. En revanche, l’honneur commande qu’il écoute respectueusement ce que son parent a à dire ; s’il faut éventuellement définir des limites à des parents trop intrusifs, il faudra le faire de manière ferme mais toujours dans le respect.

Certains parents vont donc manier, à tort ou à dessein, des extraits de livres religieux afin de s’assurer la subjugation totale de leur enfant mineur, et parfois même majeur. Le drame est que l’enfant pense que le parent a le droit d’agir ainsi en sa qualité de géniteur ou génitrice, d’autant plus que Dieu dit d’honorer ses parents. Par ailleurs, l’univers d’un enfant étant souvent très circonscrit à la cellule familiale et à l’école, il est plus sujet à croire que tous les parents se comportent comme les siens. Quelques fois, ma mère utilisait la Bible pour exercer son autorité: « La Bible dit que tu dois respecter ta mère; si tu fais ou ne fais pas ceci, tu brûleras en enfer. » J’étais jeune et je n’avais pas encore les aptitudes intellectuelles, et encore moins la maturité spirituelle adéquate, pour remettre des passages bibliques dans leur contexte littéraire, historique ou culturel. Je n’étais donc pas en mesure de reconnaître que j’étais victime d’abus spirituel. En effet, peu importe la source théologique de ses abus, Bible ou Coran, l’emploi hors contexte de versets religieux afin d’affirmer son autorité envers autrui contribue énormément à fausser l’image qu’on se fait de Dieu.

L’ équation est simple: si les parents sont les représentants de Dieu sur cette terre et que Dieu nous ordonne de les honorer, de faire absolument tout ce qu’ils nous disent de faire, ceci signifie que Dieu leur a donné carte blanche pour faire tout et n’importe quoi. IL les absoudra toujours. En fin de compte, Dieu doit être (au moins, un chouia) despotique comme le parent problématique.

Lorsqu’on se représente Dieu ainsi, on se retrouve en mode: « Faisons tout pour apaiser la divinité afin d’éviter son courroux, car je ne veux pas finir dans le lac de soufre et de feu! » Pensez-y: pourquoi dans les religions animistes ou même dans l’Islam (du moins, dans la version que j’ai vue en grandissant), les gens passent-ils encore leur temps à faire des sacrifices d’animaux? C’est soit pour s’attirer la faveur, soit pour apaiser la fureur d’une divinité… capricieuse, voire caractérielle. En un mot, l’être humain vit quasiment en mode panique 24/7 parce que la divinité a tous les pouvoirs. Il ne sait jamais sur quel pied danser alors il caresse la divinité dans le sens du poil.

 

 

Dans la culture africaine, l’obtention préalable de la bénédiction de ses parents est présentée comme une condition sine qua non de la réussite future d’un enfant. Il semble d’ailleurs que c’était aussi le cas dans la Bible avec les pères qui bénissaient leurs enfants sur leur lit de mort (Genèse 27; 49). Qu’il s’agisse d’Isaac s’adressant à Jacob et Esau (Genèse 27:28-29, 40) ou de Jacob bénissant ses enfants (Genèse 49:1-28), chaque bénédiction s’est révélée être une prophétie pour le récipiendaire.
Alors, vous imaginez bien que lorsque certains parents africains disent à leurs enfants: « si tu ne fais pas ceci ou cela, tu ne recevras pas ma bénédiction ou je te maudirai jusqu’à mon dernier souffle », ceux-ci s’exécutent dare-dare… avec la crainte de rater leurs vies. Mais bon, les croyants en Yeshua doivent se souvenir que: « Comme l’oiseau s’échappe, comme l’hirondelle s’envole, Ainsi la malédiction sans cause n’a point d’effet. » (Proverbes 26:2); OUF!

Ainsi, dans des sociétés où la bénédiction parentale est présentée comme un sésame du fait de traditions et de l’interprétation dévoyée de concepts religieux, l’enfant peut se retrouver à vivre dans un état permanent d’angoisse que les choses foirent, chaque fois qu’il fait des choix de vie allant à l’encontre des souhaits de ses parents. Pour ma part et par ricochet, j’étais habitée d’une grande méfiance à Son égard chaque fois que je m’adressais à Dieu. Pourtant, je savais très bien qu’à l’injonction du décalogue, Paul a ajouté dans le Nouveau Testament, une mise en garde aux parents et qui tient compte des droits des enfants:

« Enfants, obéissez à vos parents, selon le Seigneur, car cela est juste. Honore ton père et ta mère (c’est le premier commandement avec une promesse), afin que tu sois heureux et que tu vives longtemps sur la terre. Et vous, pères, n’irritez pas vos enfants, mais élevez-les en les corrigeant et en les instruisant selon le Seigneur.«  (Éphésiens 6:1-4)

« Enfants, obéissez en toutes choses à vos parents, car cela est agréable dans le Seigneur. Pères, n’irritez pas vos enfants, de peur qu’ils ne se découragent. » (Colossiens 3:20-21)

 

Toutefois, étant donné que le nombre de versets bibliques sur l’honneur dû aux parents l’emportent sur ceux qui mettent en garde les parents contre tout abus de leur autorité (seulement deux versets), je me posais des questions sur le poids des paroles de Paul. Je me suis donc renseignée auprès de certains chrétiens plus mûrs dans la foi, y compris des responsables, sur la raison de l’avertissement de Paul ainsi que sur l’attitude à adopter de façon concrète en tant qu’adulte vis à vis de parents qui outrepassent leurs droits.

Peine perdue puisque que je me suis butée à du scepticisme, à de la gêne, à de l’invalidation des mes expériences et de mes émotions et parfois à carrément des changements de sujets. Tous les moyens étaient bons pour ne pas parler de ces choses qui dérangent! Quoi, un parent qui devrait revoir son mode d’éducation ou sa conception du rôle de parent? Mais ça n’existe pas, voyons! On m’a ressorti les platitudes sur le respect dû aux parents, sur le fait de prier pour ses ennemis, le pardon, etc. Toi qui es plus mûr(e) dans la foi, quelle parole à propos peux-tu me donner? Parce que quand les foules allaient voir Yeshua avec leurs problèmes, IL ne bottait pas en touche ou ne leur donnait pas de cours de théologie. Non, IL ne craignait pas de regarder la situation en face, de faire preuve d’empathie et de donner LA réponse, y compris celle qui allait à l’encontre de la bien-pensance de l’époque. Lorsque je mentionnais Éphésiens 6:4 ou Colossiens 3:21 à ces chrétiens, c’était silence radio.

C’est donc, toujours intriguée par le fait que Paul ait pris la peine de mettre en garde les pères (en gros, les parents) contre toute velléité d’abus d’autorité, que j’ai décidé d’effectuer des recherches sur le contexte de ces passages. J’ai pris cette décision, car du point de vue de ma relation avec Dieu, je n’en pouvais plus de toutes ces pensées parasites me disant que l’Éternel avaient accordé les pleins pouvoirs absolus aux parents et que ces derniers étaient intouchables.

 

À l’époque de la rédaction des lettres aux Éphésiens et au Colossiens, le droit romain accorde au père de famille, en tant que pater familias (patriarche), la patria potestas (puissance paternelle). En vertu de ce pouvoir qui lui est conféré par la loi, le père de famille exerce une autorité absolue sur sa femme, toute sa descendance de lignée mâle (mariée ou pas, biologique ou adoptive) et ses esclaves, et ce, jusqu’à sa mort. Le patriarche avait même des droits sur les biens de ses enfants, qu’il pouvait même vendre en esclavage. Le pouvoir du père de famille était si large que par abus de langage, il est dit qu’il avait un pouvoir de vie et de mort sur sa femme, ses enfants et ses esclaves. Ainsi, lorsque Paul, un juif et citoyen romain s’adresse aux églises d’Éphèse et de Colosses pour leur énoncer des « codes domestiques » (Éphésiens 5:21-6:9; Colossiens 3:18-4:1), il le fait en tenant compte des lois romaines de l’époque. Aux versets 4 du 6e chapitre d’Éphésiens et 21 du 3e chapitre de Colossiens, l’apôtre met en garde contre les excès pouvant découler de l’application de la puissance paternelle par certains pères non-juifs. Paul demande ainsi aux pères de faire preuve de retenue lors de l’exercice de ce qu’on appelle aujourd’hui, l’autorité parentale. Il est important de souligner que l’apôtre donne cet avertissement aux nouveaux croyants non-juifs en Yeshua. En effet, en dépit de la position importante qu’avait le père de famille dans la culture juive de l’époque, le TaNaKh (ou même la Loi orale), n’accordait pas au père, par exemple, le pouvoir de vendre en esclavage ses enfants (même après qu’ils se soient mariés) ou de pouvoir décider de la survie d’un bébé parce qu’il serait né avec des infirmités ou qu’il serait d’un sexe indésirable (aux yeux du père).

Le parent chrétien, doit donc se comporter comme notre Père qui est dans les cieux.

A cause de cela, je fléchis les genoux devant le Père, duquel tire son nom toute famille dans les cieux et sur la terre, (Éphésiens 3:14-15)

La Bible n’a jamais, en aucune façon, justifié, excusé, rationnalisé ou minimisé l’abus parental. Par exemple, dans l’Ancient Testament, l’Éternel a en horreur les pratiques des habitants d’origine de Canaan parce qu’en autres, ils n’hésitaient pas à sacrifier leurs progénitures à des idoles en les brûlant vifs.

Lorsque tu seras entré dans le pays que l’Eternel, ton Dieu, te donne, tu n’apprendras point à imiter les abominations de ces nations-là. Qu’on ne trouve chez toi personne qui fasse passer son fils ou sa fille par le feu, personne qui exerce le métier de devin, d’astrologue, d’augure, de magicien, d’enchanteur, personne qui consulte ceux qui évoquent les esprits ou disent la bonne aventure, personne qui interroge les morts. Car quiconque fait ces choses est en abomination à l’Eternel ; et c’est à cause de ces abominations que l’Eternel, ton Dieu, va chasser ces nations devant toi. (Deutéronome 18:9-12)

Il ne peut donc pas y avoir de place pour l’abus parental cautionné par la religion puisque Dieu n’abuse jamais de son pouvoir envers nous.

Aux chrétiens issus de familles non-chrétiennes ou qui ploient sur le poids de traditions toxiques pour les individus, il est important de rappeler que lorsqu’on accepte Yeshua comme notre Messie et Seigneur, on est adopté dans la famille de Dieu (Romains 8:15). C’est LE patriarche qui doit nous servir de référence lorsqu’il s’agit d’évaluer certains agissements discutables de nos parents à notre égard. Il est très important de s’en souvenir, notamment quand on se marie, parce qu’on quitte le giron parental pour devenir un avec notre conjoint et fonder un couple qui se trouve sous l’autorité directe de l’Éternel.

Et l’homme dit: Voici cette fois celle qui est os de mes os et chair de ma chair! on l’appellera femme, parce qu’elle a été prise de l’homme.C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère, et s’attachera à sa femme, et ils deviendront une seule chair. (Genèse 2:23-24)

Par conséquent, aucun époux, aucune épouse, ne devrait accepter que l’un de ses parents pourrisse la vie à sa conjointe, à son mari, sous prétexte qu’il s’agirait de son père ou de sa mère. En effet, est-ce que Dieu se permettrait de faire fi de l’existence de ton ou ta partenaire ou de traiter cette personne par-dessus la jambe, sous prétexte qu’IL est ton Père et que tu dois accepter cette situation en silence parce que tu es SON  enfant? IL se contredirait.

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L’opinion exprimée dans ce billet n’engage que son auteure.

6 commentaires

  1. Nos parents ne sont pas nos DIEU sur DIEU, à cause c’est parole blasphématoire certains parents abuse leurs enfants sur l’autorité et autres, en Afrique un enfant peut n’a pas le droit de faire la volonté de son cœur mais la volonté des ces parents uniquement comme le mariage, les parents choisissez les femmes au village pour leurs enfants et si l’enfant refuse ces un guerre qu’il déclare au parents même chose pour la religion en Afrique les enfants ne choisissez pas la religion de leur cœur les parents leur fait choisir leur(parents) religion, y’a beaucoup de choses que leurs parents abusent des enfants en Afrique ces nombreux.

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    • Bonjour Moussa,

      Merci d’avoir partagé votre ressenti! Malheureusement, c’est effectivement souvent le cas. Ils pensent bien faire et agissent par pure ignorance. Le plus important pour toute personne devant faire face à de tels combats, est de savoir qui est Dieu, ce qu’IL veut réellement dire quand IL donne des prescriptions et surtout de ne jamais oublier que Dieu n’impose jamais rien à qui que ce soit. IL donne toujours le choix et met devant tout un chacun: « la vie et le bien, la mort et le mal, la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction » (Deutéronome 30:15-20). Même Jésus n’a pas été obligé de donner sa vie. « Le Père m’aime, parce que je donne ma vie, afin de la reprendre. Personne ne me l’ôte, mais je la donne de moi-même; j’ai le pouvoir de la donner, et j’ai le pouvoir de la reprendre: tel est l’ordre que j’ai reçu de mon Père. » (Jean 10:17-18)
      Excellentes fêtes de fin d’année et que la paix de Dieu vous accompagne en 2023!

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      • Salut, exactement vous avez raison, c’est parce-que JÉSUS ✝️ DIEU est avec que vous êtes une personne juste, ne changé jamais continue avec le Christ votre voie est parfait, que le seigneur vous bénisse qu’il vous guide et vous protège, Excellentes fêtes de fin d’année et que la paix de Dieu vous accompagne en 2023!

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  2. Vous citez Genèse 2:23-24, la réponse est là me semble-t-il. Le premier homme et sa femme, avant même de se nommer eux-mêmes (3:20), sont nos parents selon l’esprit, que représentent les nôtres selon la chair ; du coup le respect que l’on doit à ses parents est un respect d’intention qui réfère à un modèle vivant (Christ, le Nouvel Adam, est vivant en nous) et se traduit dans la forme selon nos caractères et les circonstances, mais c’est plutôt l’idée d’une paternité spirituelle qu’il est intéressant d’avoir en vue, qu’un asservissement plus ou moins consenti parce que plus ou moins compris et qui apparaît dès lors au mieux comme un devoir que l’on remplit avec joie, au pire comme une véritable corvée ou, comme il en est pour vous, comme une blessure. Votre qualité de croyante vous met à l’abri de toute sujétion : c’est vous qui décidez de votre sort et personne d’autre, sinon l’Éternel qui de toute façon a le dernier mot.

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Répondre à « Paie ce que tu me dois » (Matthieu 18:28) – B'Lev Sameach – Avec un coeur joyeux Annuler la réponse

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