« L’Éternel, ton Dieu, te suscitera du milieu de toi, d’entre tes frères, un prophète comme moi: vous l’écouterez ! » (Deutéronome 18 :15)

En prélude au prochain article de la série sur le judaïsme messianique, voici une capsule « Heure juste selon H » (c’est-à-dire de remise de pendules à l’heure) sur la Loi, vous savez ce terme qui suscite cette réponse pavlovienne chez beaucoup de croyants : « Nous ne sommes plus sous la Loi, mais sous la grâce » (Romains 6 :14 ; Galates 3 :23-25). Peut-être que comme moi, vous avez souvent eu cette réflexion tout au long de votre marche en tant que chrétien(ne) : « OK ! Normalement, c’est Dieu qui a dicté les dispositions de la Loi à Moïse donc a priori, c’est la parole de Dieu. Si c’est le cas, pourquoi est-ce que ce terme a une connotation négative ? Est-ce parce que tout le contenu de la Loi se trouve dans l’Ancien Testament et qu’en tant que croyant en Yeshua, on est désormais moins concernés par tout ce qui est écrit dans l’Ancien Testament ? » Ces questions m’ont taraudée pendant des décennies, jusqu’à ce que je décide d’ouvrir ma Bible et de la lire attentivement en commençant par le livre de la Genèse (et non celui de Matthieu). Je vais donc partager avec vous ce que j’ai enfin compris sur la Loi et ses implications pour les croyants en Yeshua. N’hésitez surtout pas à me faire part de vos commentaires sur mes conclusions !

Au commencement, il eut la Loi de Moïse

Selon le « Dictionnaire biblique et théologique » de la version Segond 21 de la Bible, le mot Torah signifie avant tout en hébreu et au sens strict du terme : « enseignement » (doctrine, direction, instruction révélée). Mais pour la plupart des gens, ce mot évoque « la Loi de Moïse, תֹּורַת מֹשֶׁה Torat Moshe, c’est-à-dire l’ensemble des préceptes donnés aux Israélites » par l’Éternel (Exode 19-24 ; Deutéronome 4 :44-26 :19 ; Malachie 3 :22). Ce groupe d’ordonnances régissait « leur vie spirituelle, personnelle, familiale et sociale. »

La loi de Moïse est subdivisée en trois parties :

• les lois morales : elles incluent les 10 commandements (Exode 20 :1-17 ; Deutéronome 5 :5-22). Ces lois enseignaient au peuple quel devrait être son attitude envers Dieu et son prochain.
• les lois relatives à l’administration de la justice : elles gouvernaient les rapports quotidiens des membres du peuple, que ce soit pour la famille, les biens, les mœurs, l’aspect pénal, etc.
• les lois cérémonielles : elles comprenaient les instructions sur ce qui était pur et impur, le sacerdoce, la manière appropriée d’adorer l’Éternel et de Lui présenter des sacrifices, les dates des convocations annuelles, etc.

C’est le don de la Loi qui a scellé l’alliance que l’Éternel a faite avec le peuple d’Israël au mont Sinaï.

(Au sein du judaïsme rabbinique, le terme Torah fait, entre autres, référence à la « loi écrite » (le Pentateuque) AINSI QU’ à la « loi orale » (Mishnah) (qui est codifiée dans le Talmud)).

 

Pourquoi la Loi a-t-elle été donnée, d’après l’Ancien Testament ?

Selon la Bible, l’Éternel a donné la Loi à Moïse et au peuple d’Israël, entre autres :

• pour le bien du peuple (Deutéronome 5 :31-33 ; 10 :12-13) ;
• afin de Se révéler à eux (Deutéronome 31 :12-13) ;
• afin de les mettre à part (kadosh), pour qu’Israël devienne une nation sacerdotale et révèle l’unique DIEU QUI EST (Exode 3 :14), au reste des nations (Exode 19 :5-6 ; 34 :10 ; Deutéronome 28 : 9-10) ;
• afin d’illustrer à l’humanité qu’elle a besoin d’un sauveur, à travers la connaissance du péché.

« Or, nous savons que tout ce que dit la loi, elle le dit à ceux qui sont sous la loi, afin que toute bouche soit fermée, et que tout le monde soit reconnu coupable devant Dieu. Car nul ne sera justifié devant lui par les œuvres de la loi, puisque c’est par la loi que vient la connaissance du péché. » (Romains 3 :19-20 ; cf. Romains 7 :7)

Par extension et à cause de la traduction du mot par nomos (normes, lois) dans la Septante, Torah ou « Loi de Moïse » va désigner le Pentateuque (les cinq premiers livres de la Bible). Dans les Écrits du Nouveau Testament, le terme « Loi » va aussi faire référence à l’Ancien Testament, c’est-à-dire l’intégralité du TaNaKh (Jean 12 :34 ; 1 Corinthiens 14 :21). Étant donné toutes ces différentes acceptions du mot « Loi », il est donc très important pour tout disciple de Yeshua de savoir à quoi font exactement référence les passages du Nouveau Testament qui emploient ce terme.

 

 

Puis vint le Messie ; la Loi est-elle désormais reléguée aux oubliettes ?

« Ne croyez pas que Je sois venu pour abolir (kataluô) la loi ou les prophètes; Je suis venu non pour abolir (kataluô), mais pour accomplir (pleroô). Car, Je vous le dis en vérité, tant que le ciel et la terre ne passeront point, il ne disparaîtra pas de la Loi, un seul iota ou un seul trait de lettre, jusqu’à ce que tout soit arrivé. Celui donc qui supprimera l’un de ces plus petits commandements, et qui enseignera aux hommes à faire de même, sera appelé le plus petit dans le royaume des cieux; mais celui qui les observera, et qui enseignera à les observer, celui-là sera appelé grand dans le royaume des cieux. » (Matthieu 5 :17-19)

Ces versets représentent une pierre d’achoppement pour tant de croyants en Yeshua, le verbe « accomplir » étant souvent brandi comme l’argument irréfutable d’un rejet absolu de TOUT ce qui est relatif à la Loi de Moïse et, pour les plus extrémistes, de l’Ancien Testament. Ces réactions posent la question de l’objet et de la fonction de la Loi.

 

Quel est l’objet de la Loi ?

Dans Exode 19:5-6, l’Éternel exhorte les enfants d’Israël à être un peuple à part, un peuple saint (kadosh) afin qu’ils puissent mettre en œuvre leur appel à être la lumière des nations par leur mode de vie.

« Maintenant, si vous écoutez Ma voix, et si vous gardez Mon alliance, vous M’appartiendrez entre tous les peuples, car toute la terre est à Moi; vous serez pour Moi un royaume de sacrificateurs et une nation sainte. Voilà les paroles que tu diras aux enfants d’Israël. » (Exode 19 :5-6)

La Loi, cet ensemble de préceptes donnés afin de régir les aspects spirituels, civils, sociaux et personnels du peuple d’Israël, sert donc de code de conduite devant aider les assujettis à sanctifier leur conduite de manière irrépréhensible. En s’y conformant, Israël remplit donc son rôle de peuple mis à part (kadosh), afin de servir d’exemple aux autres nations qui ne connaissent pas l’Éternel et les inciter à venir à Sa rencontre. Or, les termes de l’Alliance conclue entre l’Éternel et Israël étaient très contraignants pour le peuple :

« *Maudit soit celui qui ne ratifie (quwm) pas les paroles de cette loi (torah) pour les mettre en pratique!’ Et tout le peuple dira: ‘Amen!’ » (Deutéronome 27 :26 ; cf. Deutéronome 28 :14 ; Jacques 2 :10-11)

Le mot hébreu quwm, traduit par « ratifier », peut également être interprété comme signifiant : « parfaire, mener à son terme, accomplir l’objet de quelque chose », ce qui correspond au sens du terme grec pleroô employé dans Matthieu 5 :17. Par sa crucifixion et en devenant donc malédiction (Galates 3 :13) afin que le salut soit accordé à tous, le Messie a bel et bien accompli la Loi « car Christ est la fin de la loi, pour la justification de tous ceux qui croient. » (Romains 10 :4). Yeshua a accompli la Loi et les prophètes, notamment les prophéties du TaNaKh qui pointaient vers Lui, en ratifiant pour nous et par Sa mort, les paroles de Dieu auxquelles aucun être humain n’aurait jamais pu obéir dans leur intégralité sans les transgresser (Romains 8 :3-4).

Par ailleurs, l’auteur du livre de Matthieu a utilisé le verbe kataluô (dissoudre, rendre vain quelque chose) dans Matthieu 5 :17, afin d’indiquer que Yeshua ne nous délivre pas de l’esprit de la Loi, mais de la lettre de celle-ci, comme on le voit d’ailleurs au verset 19 du passage (cf. 2 Corinthiens 3 :6).

Tout au long de Sa vie terrestre lors de sa première venue, le Messie a respecté les dispositions bibliques de la Loi en parfait accord avec la volonté de Son Père (Matthieu 8 :4 ; 26 :19 ; Jean 7 :10).

« Vous n’ajouterez rien à ce que je vous prescris, et vous n’en retrancherez rien; mais vous observerez les commandements de l’Éternel, votre Dieu, tels que je vous les prescris. » (Deutéronome 4 :2)

Puis, par Sa mort sur la croix, Yeshua va amener la Loi à perfection (tout étant enfin arrivé ; cf. Matthieu 5 :18 ; Galates 2 :21).

 

Quelle est la fonction de la Loi ?

« Pourquoi donc la loi? Elle a été ajoutée ensuite à cause des transgressions, jusqu’à ce que vienne la descendance à qui la promesse avait été faite; elle a été promulguée par des anges, au moyen d’un médiateur.» (Galates 3 :19 ; Segond 21)

La Loi a été ajoutée à la promesse faite à Abraham et à sa descendance, en attendant la venue du Shiloh (Genèse 49 :10), afin qu’elle leur serve de boussole vers la sainteté désirée par Dieu. Dieu étant saint, toute personne souhaitant s’approcher et être en communion avec Lui, doit être également saint. Par ailleurs, la Loi en tant que pédagogue, nous rappelle incessamment que nous ne pourrons jamais être justes devant Dieu grâce à nos efforts. Le respect mécanique à la lettre des prescriptions de la Loi n’a jamais été une garantie de salut éternel.

« La loi est-elle donc contre les promesses de Dieu ? Loin de là ! S’il eût été donné une loi qui pût procurer la vie, la justice viendrait réellement de la loi. Mais l’Écriture a tout renfermé sous le péché, afin que ce qui avait été promis fût donné par la foi en Jésus-Christ à ceux qui croient. Avant que la foi vînt, nous étions enfermés sous la garde de la loi, en vue de la foi qui devait être révélée. Ainsi la loi a été comme un pédagogue pour nous conduire à Christ, afin que nous fussions justifiés par la foi. La foi étant venue, nous ne sommes plus sous ce pédagogue. » (Galates 3:21-25)

Les œuvres de la loi

À l’époque du Second Temple, de nombreux juifs pensaient que tout ce que la Loi exigeait d’eux, était d’observer à la lettre les ordonnances; c’est ce que Paul  a qualifié d’ « œuvres de la loi ».

NB: Toutes les dénominations chrétiennes n’ont pas la même interprétation des « œuvres de la loi ». Ce fût d’ailleurs, l’une des raisons de la Réforme initiée par Martin Luther. Par exemple, selon la doctrine catholique, lorsque Paul parle d’ « œuvres de la loi », il ferait uniquement référence au respect rigoureux des lois cérémonielles de la Loi. Ainsi, nul ne serait justifié en effectuant des sacrifices d’animaux; désormais, la justification est octroyée par le baptême, sacrement de la foi. Quant aux protestants, tout effort humain, qui résulte en une bonne action (ex: ramener un objet perdu, rendre visite aux malades, etc), constitue une  œuvre de la loi. Cependant en 1947, le document 4QMMT, l’un des Manuscrits de la mer Morte apporte un autre éclairage. MMT est l’acronyme de Miqsat Ma’ase ha-Torah, traduit en français par: « Certains préceptes de la Loi ». Il s’agit d’une lettre rédigée par les Esséniens de Qumrân aux Pharisiens à propos de la pureté rituelle. À ce jour, ce document serait le seul, à l’exception des écrits de Paul, où l’on retrouve l’expression « œuvres de la loi ».

Lorsque Paul emploie cette expression dans les épîtres aux Romains et aux Galates, il proteste contre toute action dictée par du pur légalisme. Agir de la sorte n’est absolument pas un gage de justice (et ultimement de salut éternel) devant l’Éternel. Dans Romains 3, Paul explique le rôle de la Loi dans la vie spirituelle du croyant juif en Yeshua :

• Tout être humain possède une inclination à faire le mal. « Quoi donc ! sommes-nous plus excellents ? Nullement. Car nous avons déjà prouvé que tous, Juifs et Grecs, sont sous l’empire du péché, selon qu’il est écrit : Il n’y a point de juste, pas même un seul » (versets 9-10) ;
• D’après l’apôtre Jean, « le péché est la transgression de la Loi. » (1 Jean 3:4) Paul partage le même sentiment, en disant que le recours à un moyen ne devrait pas être confondu avec l’atteinte d’un objectif : « Or, nous savons que tout ce que dit la loi, elle le dit à ceux qui sont sous la loi, afin que toute bouche soit fermée, et que tout le monde soit reconnu coupable devant Dieu. Car nul ne sera justifié devant lui par les œuvres de la loi, puisque c’est par la loi que vient la connaissance du péché. » (Romains 3:19-20). Afin de mieux comprendre la nuance importante faite par Paul, on pourrait comparer la Loi à un code pénal ou civil. Un code permet à la population de savoir ce qu’elle devrait respecter ou éviter, tandis qu’il aide un juge à déterminer si une personne est en infraction avec la loi. En revanche, ce n’est pas parce qu’un code nous dit ce qui est interdit ou permis dans une société donnée, qu’on pourrait uniquement se baser sur lui pour conclure en la bonté, voire sainteté, d’une personne. En effet, la société est composée de personnes qui ne comparaîtront jamais devant un juge, uniquement parce qu’elles ne violeront jamais des lois, mais ça ne change rien à la nature de ces individus: avares, égocentriques, manipulateurs, etc.
• Par conséquent, en raison de l’inclinaison de son cœur au péché, il ne sert ABSOLUMENT à rien à l’être humain d’essayer, par ses propres efforts, d’être reconnu comme juste aux yeux de Dieu et en dehors de la foi dans le Messie, Yeshua dont le nom signifie : « Dieu sauve ».

« Car tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu; et ils sont gratuitement justifiés par sa grâce, par le moyen de la rédemption qui est en Jésus-Christ. » (Romains 3 :23-24 ; cf. Galates 2 :14-21)

« Car nous pensons que l’homme est justifié par la foi, sans les œuvres de la loi. » (Romains 3 :28)

Oui, mais Moïse avait pourtant dit…

« Nous aurons la justice en partage, si nous mettons soigneusement en pratique tous ces commandements devant l’Éternel, notre Dieu, comme IL nous l’a ordonné. » (Deutéronome 6 :25)

En effet! Mais la suite dans quelques jours…

 

En attendant, voici une traduction simultanée en français d’un commentaire de la Parasha Mishpatim (Les ordonnances) qui porte sur les passages suivants: Exode 21-1 à 24:18.

 

2ème partie

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L’opinion exprimée dans ce billet n’engage que son auteure.