Qui était Jésus? – 1ère partie

 

Je lui demande: « Il ressemble à Jésus, non? Enfin, le Jésus des films, pas le blond aux cheveux longs et yeux bleus des tableaux! »😛 Deb, me regarde en silence, puis me répond en riant: « On ne m’a jamais posé cette question ». Je venais de lui montrer la photo d’une connaissance dont les traits physiques me font toujours à la représentation hollywoodienne du Messie. Pourtant, les Écritures ont délibérément fait le choix de ne pas nous dire à quoi ressemblait exactement le Seigneur lorsqu’IL s’est incarné en Yeshua. On nous fait juste comprendre qu’IL n’était pas « canon ».

« Qui a cru à ce qui nous était annoncé? Qui a reconnu le bras de l’Éternel? Il s’est élevé devant lui comme une faible plante, Comme un rejeton qui sort d’une terre desséchée; Il n’avait ni beauté ni éclat pour attirer nos regards, Et son aspect n’avait rien pour nous plaire.«  (Ésaïe 53:1-2)

Je l’indique d’ailleurs à Deb avec un « Oh, IL n’était pas beau. On nous le dit dans le livre d’Isaïe. IL n’avait rien à voir avec ce que l’on voit sur les tableaux. IL avait (probablement) des papillotes et des franges à ses vêtements. » Deb me dit alors surprise: « Ah oui? Je pensais que seuls les juifs hassidiques ont des papillotes autour du visage. »

Chaque fois que j’ai des conversations qui m’amènent à déconstruire certaines de mes croyances et à revisiter l’identité juive de Yeshua, je ne peux m’empêcher de repenser à ces paroles d’un activiste Inuit sur la page d’accueil du site qu’il a créé pour présenter sa communauté: « Je me suis rendu compte que les gens avaient entendu parler de nous et nous connaissaient à travers le regard et les dires d’une autre culture. Il était temps que l’on se présente nous-mêmes aux autres, que l’on raconte nous-même notre histoire. » Ces paroles ne sont pas anodines; pour ceux qui n’ont jamais rencontré, par exemple, de vrais aborigènes d’Australie, d’authentiques Cherokee ou de Vietnamiens ayant dû fuir leur pays à cause de la guerre du Vietnam, à travers les yeux de qui, avons-nous appris l’existence de ces gens? Les idées que l’on se fait de leur habillement ou de leurs mœurs sont-elles conformes à la réalité ou se fondent-elles sur une représentation filtrée à travers une autre culture? Dans la même veine, combien de chrétiens se souviennent que Jésus (Yeshua), Simon (Shimeon), Jean (Yochanan), Jacques (Yaakov) ou Paul (Shaul), étaient des hommes juifs, imprégnés des us et coutumes de la culture du peuple juif, identité qu’ils n’ont jamais reniée? (Matthieu 15:24; Actes 22:3; 23:6) Combien de juifs se disent aujourd’hui: « C’était l’un des nôtres, indépendamment de ses affirmations; ce n’était pas un membre des nations païennes (dans le sens où le mot « païen » est compris dans la Bible) » lorsqu’ils entendent le nom « Yeshu », au lieu de ne pas pouvoir souffrir de l’entendre? Étant donné toutes les persécutions à leur encontre ont été menées soi-disant au nom de « ce Jésus », je peux comprendre l’hostilité et la méfiance de beaucoup par rapport à tout ce qui est relatif au Christ.

En effet, voici deux millénaires que le Messie est présenté avec insistance à travers un filtre aux mailles tellement souples qu’on en oublie que:

  • les premiers disciples de Yeshua et donc les tout premiers chrétiens, étaient d’autres juifs comme lui (Actes 2 :9);
  • les premiers chrétiens non juifs étaient les ancêtres des chrétiens d’Orient d’aujourd’hui (Actes 2 :10);
  • Jésus ne s’appelait pas vraiment « Jésus » et il en est de même pour Marie, Joseph, Matthieu, Jude, etc.;
  • même si le Nouveau-Testament a été rédigé, le Seigneur ne s’est pas exprimé avec la foule dans cette langue ou a encore moins lu les Écritures (qui étaient disponibles à son époque – notre Ancien Testament) en grec à la Synagogue ou les a citées dans cette langue à la foule.

Mais au fait, qui considère-t-on comme un juif (aujourd’hui)? Un adepte du judaïsme rabbinique (convertis y compris)? Une personne dont la mère est juive? S’agit-il de quelqu’un qui porte une kippah, des phylactères ou un chapeau et des vêtements noirs? Est-ce quelqu’un qui pratique le sabbat à partir du vendredi au coucher du soleil? Est-ce quelqu’un qui ne mange que « kasher »?

Plus important, qui était considéré comme juif à l’époque de Jésus? Était-ce toute personne dont les ancêtres étaient issus de la descendance de l’un des 12 fils de Jacob? Un Galiléen était-il un juif ou seuls les habitants de la Judée étaient appelés ainsi? Est-ce qu’un prosélyte à l’époque de Yeshua devenait un membre à part entière du reste d’Israël vivant encore en terre sainte ou était-il encore considéré comme étant un ressortissant de son peuple d’origine? Ces questions feront l’objet d’autres publications. (Mais je peux déjà vous dire que Deb était sur la bonne voie en ce qui concerne le port des papillotes. D’après Ann Spangler et Lois Tverberg, auteures de « Sitting at the Feet of Rabbi Jesus: How the Jewishness of Jesus Can Transform Your Faith », apparemment, les juifs à l’époque de Yeshua n’en portaient pas. D’après elle, cette tradition dont certains trouvent l’origine dans Lévitique 19 :27 et d’autres dans Lévitique 19 :9-10 date juste de quelques siècles.) Bref; revenons à l’objet de cette publication!

 

Même si la religion des disciples de Yeshua se nomme aujourd’hui « christianisme », on constate en lisant les évangiles que Yeshua n’était pas un chrétien et qu’il est né, a vécu et est mort en tant que juif.

 

Flickr | Yeshua HaMashiach – Hebrew Letters by Mendes9

 

  • Généalogie: Matthieu 1, Luc 3: 23-38

Yeshua (Jésus) était un juif de la tribu de Yehudah (Judah), nous rappelle-t-on dans Romains 1 :3. Eitan Bar, dans son livre, « Refuting Rabbinic Objections to Christianity & Messianic Prophecies”, souligne qu’à l’époque du 2e Temple, il était possible de consulter la généalogie des membres du peuple d’Israël au Temple. Par conséquent, si Yeshua n’était pas de la lignée du roi David, les prêtres de l’époque n’auraient pas manqué de le faire remarquer.

  • Respect des instructions bibliques relatives à l’accouchement et à la naissance d’un enfant mâle juif et à la célébration de la Pâque juive

Après son accouchement et selon les prescriptions de Lévitique 12 :1-3, Miriam (Marie) et Yosef (Joseph) ont fait circoncire l’enfant et lui ont donné le nom de Yeshua, tel qu’instruit par l’ange Gabriel (Luc 1 :31). Luc, prend le temps de nous indiquer que Marie a observé la période de purification imposée à toute femme juive venant de mettre au monde un garçon (Lévitique 12 :2). Ensuite, toujours selon les instructions données par l’Éternel à Moïse (Exode 13 :2, 12; Nombres 3 :13; 8 :17), les nouveaux parents vont consacrer leur premier-né au Seigneur en le présentant au Temple (Luc 2 :23). Ils vont aussi profiter de la visite pour effectuer l’holocauste et le sacrifice d’expiation requis pour la purification de Marie après son accouchement (Lévitique 12 :6-8). L’évangéliste Luc explique qu’à la place d’un agneau, Marie et Joseph ont sacrifié des oiseaux (Luc 2 :24). On peut par ailleurs en déduire que lorsqu’il a décidé de s’incarner, le Seigneur l’a fait au sein d’une famille à très faibles revenus. Yeshua a été élevé par un couple de juifs qui suivaient scrupuleusement les ordonnances de Dieu (Luc 2 :39) et se rendaient chaque année en famille à Jérusalem afin de célébrer Pesach (Luc 2 :41-43), de nouveau selon les prescriptions de l’Éternel à Moïse (Deutéronome 16 :2, 5-6).

  • Baptême

Comme je l’ai déjà expliqué, le baptême (t’vilah) dans un but de purification spirituelle est un concept juif qui trouve son origine dans certains rituels prescrits dans l’Ancien Testament (Exode 30:17-21; Lévitique 15). Il n’était donc pas étranger pour les juifs de l’époque de Yeshua de voir Yochanan le baptiste (Jean-Baptiste) baptiser des gens sur les rives du Jourdain (Luc 3 :21; Jean 1 :24). Toutefois, le baptême de Jean-Baptiste était différent car il en était un de repentance, conformément à la prophétie d’Ésaïe (Ésaïe 40 :3). Le Messie Yeshua, qui n’avait nullement besoin de se faire baptiser, l’a fait afin de montrer à ses disciples l’exemple (Matthieu 3 :13-15). De quel exemple parle-t-on? De montrer publiquement qu’on était né de nouveau et qu’on s’engageait envers Dieu à se détourner de ses anciennes voies pour désormais vivre conformément à la volonté et aux commandements de Dieu (1 Pierre 3 :21).

  • L’habillement de Yeshua

Wikimedia Commons

Nous le savons tous, dans certaines cultures, les convictions religieuses ont un impact sur la façon dont les individus s’habillent. Dans le livre des Nombres, l’Éternel donne des instructions en ce sens à Moïse :

« L’Éternel dit à Moïse: Parle aux enfants d’Israël, et dis-leur qu’ils se fassent, de génération en génération, une frange au bord de leurs vêtements, et qu’ils mettent un cordon bleu sur cette frange du bord de leurs vêtements. Quand vous aurez cette frange, vous la regarderez, et vous vous souviendrez de tous les commandements de l’Éternel pour les mettre en pratique, et vous ne suivrez pas les désirs de vos cœurs et de vos yeux pour vous laisser entraîner à l’infidélité. » (Nombres 15 :37-39)

Yeshua s’est-il conformé à cette prescription et avait-il des tzitziot sur le bord de ses vêtements? Oui, Matthieu 9 :20 nous l’affirme; cf. aussi Marc 6 :56. Aujourd’hui, au lieu de seulement avoir des franges sur le châle de prière (tallit), certains juifs orthodoxes et hassidiques portent des vêtements avec des franges comme à l’époque de Yeshua.

  • Yeshua, le Juif pratiquant

Les évangiles nous le disent : Yeshua se rendait au Temple à Jérusalem (ex : épisode de l’expulsion des marchands) et allait à la synagogue (Luc 4 :15-27). Lorsqu’on lui demande quel est le plus grand commandement de la Loi, il n’hésite pas à citer le Shema (Deutéronome 6 :4-5), suivi immédiatement de Lévitique 19 :18, un autre précepte important du judaïsme (Marc 12 :28-30). Le Shema est une déclaration d’engagement profonde envers l’Éternel que même aujourd’hui, les mots qui la composent sont les derniers prononcés par plusieurs juifs avant de mourir.

Yeshua célèbre aussi bien les fêtes que l’Éternel a décrétées dans Lévitique 23, que des commémorations d’évènements miraculeux :

    • Sukkot, la fête des tentes (Lévitique 23 :33-43; Jean 7);
    • Pesach, la Pâque (Exode 12 :2-13 :8; Lévitique 23 :4-8); beaucoup d’auteurs s’accordent à dire que le dernier repas du Seigneur était un repas pascal juif typique, un seder (Matthieu 26:17-29; Marc 14:12-25, Luc 22:7-19).
    • Hanukkah, la fête de la Dédicace (Jean 10 :22).

Dans la seconde partie, j’aborderai, entre autres, quelques notions fondamentales de la foi chrétienne qui puisent leurs origines dans le judaïsme du 2e temple et qui appuient l’idée que Yeshua était à la fois ethniquement et religieusement juif (pardonnez-moi cette tautologie mais elle semble s’imposer après 2000 ans d’une certaine théologie chrétienne).

Flickr | David Williss – Bougies allumées la 7e nuit d’Hanukkah

En attendant, si vous croisez des juifs, messianiques ou non, vous pouvez leur souhaiter une bonne fête de Hanukkah qui a lieu cette année du 10 au 18 décembre.

2ème partie


L’opinion exprimée dans ce billet n’engage que son auteure.

7 commentaires

  1. […] Yeshua est un prénom hébreu signifiant «l’Éternel sauve, l’Éternel délivre » (Matthieu 1 :21 ; Psaume 130 :8). Ce prénom a été translittéré par « Iesous » en grec, qui a été traduit par « Jésus » en français. Étant donné que des millions de juifs ont été persécutés dans l’histoire au nom de « Jésus », ce prénom évoque plutôt l’antisémitisme à beaucoup de juifs. Hormis le fait que Yeshua (et non Iesous), était probablement le nom utilisé par les juifs, le remploi de ce prénom juif rappelle que le Messie n’est pas issu des peuples non-juifs. […]

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